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Posted: 10 Nov, 2024 @ 11:15am
Updated: 12 Nov, 2024 @ 10:22am

En novembre 2022, Digital Eclipse sortait "Atari 50: The Anniversary Celebration", qui allait révolutionner ce que l'on était en droit d'attendre d'une compilation de vieux jeux: au lieu de simplement fournir ce qu'offre déjà l'émulation gratuite avec comme seule valeur ajoutée une présentation plus ou moins sophistiquée, elle mettait en avant l'importance historique de jeux qui n'avaient pas tous bien vieilli, à la manière d'un musée structuré en lignes chronologiques claires, où les jeux étaient accompagnés de leur manuel d'origine et d'une reproduction en 3D de leur packaging, mais étaient surtout complétés par de multiples publicités, flyers, citations, anecdotes, interviews, photos, documents de développement, concepts artistiques, critiques, etc. reconstituant un contexte et véhiculant un sens dont l'intérêt transcendait celui des jeux proprement dits.
Ainsi, plutôt qu'une compilation de jeux agrémentée de quelques documents, il s'agissait d'un véritable récit historique complet que les jeux servaient à illustrer.

Fort de son concept alors baptisé "Gold Master Series", Digital Eclipse sortit ensuite dans le même élan "The Making of Karateka" en août 2023, puis "Llamasoft: The Jeff Minter Story" l'année suivante en mars, suivi de "Tetris Forever" en novembre de la même année!

Personnellement, j'ai peu connu Jeff Minter lors de son heure de gloire dans les années 1980, même si je jouais déjà aux jeux vidéo: je possédais un Amstrad alors que Minter programmait surtout sur les machines Commodore, c'était donc pour moi une vague référence. Même si j'ai ensuite joué à "Space Giraffe" à sa sortie sur Xbox 360 (je n'avais alors pas compris le jeu), ce n'est qu'après être tombé amoureux de "Moose Life" et son expérience hallucigéno-ludique stupéfiante en 2020 que je me suis véritablement intéressé à Minter, me régalant ensuite de "Polybius", "Minotaur Arcade Vol. 1", "Tempest 4000" et "Akka Arrh", (re)découvrant après dans la foulée ses anciens jeux du même style, "Space Giraffe" (que je vois désormais comme un des meilleurs jeux à scores jamais créés), "Gridrunner Revolution" et "Tempest 2000".

Pour mieux comprendre l'auteur, j'avais essayé de m'intéresser à ses périodes 8-bit et 16-bit par le biais de l'émulation, mais avec peu de succès: sortis de leur époque, j'ai trouvé ces jeux difficiles à pleinement apprécier.

"Llamasoft: The Jeff Minter Story" tombe à pic: il restitue fidèlement l'ère 8-bit, et au-delà, la personnalité et le parcours de Jeff Minter, qui a réussi l'exploit de traverser toutes les périodes du jeu vidéo en conservant toujours son intégrité (mais en mûrissant néanmoins en tant que développeur et artiste). La collection se concentre surtout sur le début de sa carrière, depuis ses tout premiers jeux sur ZX81 et VIC-20 jusqu'à "Tempest 2000" sur Jaguar, on ne trouvera donc pas ici ses jeux ultérieurs disponibles par ailleurs sur Steam (jouez-y) ni ses jeux sur iOS qui ont depuis été perdus (et c'est vraiment regrettable). Par ailleurs, les jeux sur Atari ST ont ici paraît-il des soucis d'émulation, étant des versions Jaguar émulant le ST, mais ils sont peu nombreux (trois) et cette période est à mon avis la pire de Minter de toute façon (même son célèbre "Llamatron: 2112", que je trouve pénible à jouer et dont le seul intérêt est sa remise à la mode du twin stick shooter).

Pour ce qui est des documents, le contenu est ici encore plus complet que dans "Atari 50" qui avait un sujet bien plus vaste: on comprend pleinement le phénomène Minter, devenu une star en Angleterre dans les années 1980, voire un gourou curieusement influent (on peut d'ailleurs deviner en filigrane que ça lui est monté à la tête) - on voit bien d'où il vient, le pourquoi de certains virages surprenants (ses "light synthesizers" notamment), ses forces et ses faiblesses. Les jeux sont bien présentés et bien émulés ("Tempest 2000" est ici dans sa meilleure version, avec une option graphique supplémentaire par rapport à "Atari 50"), certains jeux restent très amusants ("Tempest 2000" et les variations de "Gridrunner" en particulier) et les autres sont rendus bien plus intéressants par tout ce qui les environne. Il y a plusieurs options d'affichage, l'ergonomie a été adaptée au pad (les jeux pouvaient utiliser le clavier des micro-ordinateurs), et on peut rembobiner l'action, ce qui est très pratique pour les jeux les plus durs ou les plus obscurs. Les bizarreries de chaque jeu sont bien expliquées (y jouer "en aveugle" est souvent suicidaire). En bonus, on peut jouer à un "remaster" de "Gridrunner", qui lui ajoute une couche visuelle moderne sympathique.

J'ai adoré "Llamasoft: The Jeff Minter Story", qui non seulement m'a fait passer un très bon moment, mais me fait désormais encore plus apprécier les jeux de Jeff Minter sur Steam ainsi que la personnalité du bonhomme, et surtout et plus largement, comme tous les autres volets de la "Gold Master Series", il m'aura fait encore davantage apprécier le jeu vidéo en général.

(liste de toutes mes évaluations sur mon blog[simbabbad.blogspot.com])
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